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Les traditions les plus diverses se heurtaient là et, bien que les temps fussent changés, à de certaines heures la haine y brillait encore à flamme haute.

Le langage variait d’une porte à l’autre comme variait la façon de s’habiller, de se nourrir et de meubler sa maison, comme variaient les jeux, les chants, les divertissements de jeunesse.

Les Dissidents surtout excitaient la curiosité. Mais se sentant d’âme étrangère et craignant les moqueries, ils ne se livraient guère.

Une fois, il était venu des messieurs de ville, peut-être même de Paris, qui avaient su les amignonner et les endormir. Après cela il avait été question d’eux dans un journal. Il était dit que leur chapelle était une grande bâtisse vulgaire ornée avec des saints de quatre sous et des bonnes vierges de camelote. Il était parlé — bonnement, à vrai dire, mais cependant avec un peu de légèreté — de leur bénitier et de leur « musée », deux choses auxquelles ils tenaient beaucoup.

Leur bénitier était comme tous ceux qu’on voit dans les églises catholiques, mais il avait ceci de particulier qu’il n’était jamais vidé. L’eau en avait été bénite par leur dernier prêtre ; cela remontait loin. Depuis on avait ajouté chaque jour quelques gouttes afin que le niveau fût toujours le même.

Quant à leur « musée », c’était une collection de petits animaux blancs, taillés par un vieux paysan, un de leurs saints, avec un couteau de poche, dans les os de la viande. Que cela fût moins beau que les grandes statues que l’on voit dans les villes, d’accord ;