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la guerre des boutons


petite armée, babillante, gaie et sans penser à mal, s’achemina vers la forteresse.

Lebrac, selon son habitude, tenait la tête ; Tintin, au milieu de la colonne et sans avoir l’air de penser à rien, marchait à hauteur de Bacaillé sur qui il ne jetait même pas les yeux ; à l’arrière-garde, fermant la marche et ne perdant point de vue l’accusé, venaient La Crique et Camus dont les blessures étaient en bonne voie de guérison.

Bacaillé était visiblement agité de pensées complexes, car il ne savait rien au juste de ce qu’avaient fait les Velrans : qu’allait-on trouver à la cabane ? Quelle gueule feraient Lebrac et Camus et les autres si…

Il les regardait de temps à autre à la dérobée, et ses yeux pétillaient malgré lui de malice contenue, de joie refrénée et aussi d’un léger sentiment de crainte.

Et s’ils allaient se douter ! Mais comment pourraient-ils savoir et surtout prouver ?

On avançait dans le sentier du bois. Et La Crique penché vers le grimpeur lui disait :

– Hein, Camus, tes corbeaux d’hier, tu te souviens… j’aurais jamais cru. C’est tout de même vrai que ça porte malheur quelquefois ces bêtes-là.

– Demande voir à Bacaillé, riposta Camus, qui, par un inexplicable revirement, redevenait sceptique,