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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

même. Dans les événements extérieurs, dis-toi toujours qu’ils viennent ou du hasard ou de la Providence ; et il n’y a, ni à se plaindre du hasard, ni à accuser la Providence[1].

En second lieu, considère un peu ce qu’est un être quelconque depuis le moment qu’il est à l’état de simple germe, jusqu’à celui où il reçoit une âme[2], et depuis le moment où l’âme lui est donnée jusqu’au moment où il doit la rendre ; et vois de quels éléments il est composé, et en quels éléments il se dissout !

En troisième lieu, suppose qu’en t’élevant tout à coup, au sommet des airs, tu puisses contempler à tes pieds les choses humaines, observant cette infinie variété sous toutes ses faces, et embrassant d’un regard tout ce que l’air et l’éther renferment dans leur vaste sein ; ne te dirais-tu pas, toutes les fois que tu t’élèverais, en ayant sous les yeux ce spectacle toujours uniforme et

    demander beaucoup à la faiblesse humaine ; mais c’est en demandant beaucoup de l’homme que le Stoïcisme en a tant obtenu.

  1. Accuser la Providence. C’est une aberration que le Stoïcisme n’a jamais commise.
  2. Il reçoit une âme. C’est le moment de la naissance, et l’âme est prise ici pour la vie, au sortir du sein de la mère. Cette seconde réflexion regarde surtout la fragilité trop évidente de notre être, comme la troisième regarde la mobilité générale des choses.