Page:Pensées de Marc-Aurèle, trad. Barthélemy-Saint-Hilaire.djvu/388

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
366
PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

flattés, c’est d’être imités[1] par les êtres auxquels ils ont accordé la raison ; et que si le figuier doit remplir le rôle de figuier, le chien le rôle de chien, l’abeille le rôle d’abeille, l’homme doit remplir également ses fonctions d’homme.

IX

Un histrion, des travaux de guerre[2], un vain effroi, la paresse, la servilité d’esprit, effaceront chaque jour de ton âme les saintes maximes que nous découvre l’étude de la nature, et que tu négliges. Tes réflexions et tes actes doivent toujours être conduits de telle sorte que tu accomplisses à la fois ce que les circonstances exigent, et qu’en même temps tu pratiques ce que la théorie nous enseigne ; et sache, avec tout ce que nous peut apprendre la science des choses[3], con-

  1. C’est d’être imités. Doctrine platonicienne que nous avons déjà vue plus haut, liv. III, § 4, et livre V, § 27.
  2. Un histrion, des travaux de guerre. Il est assez probable qu’ici Marc-Aurèle fait allusion à quelque détail de sa vie intime, et qu’il retrace au vrai les distractions inévitables de son âme, au milieu de toutes les occupations dont il était assailli. L’âme se dissipe malgré elle dans les mille riens de chaque jour ; et de là, la nécessité de fortes maximes qu’on ne perd pas de vue un instant dans sa conduite. De là aussi, la nécessité de quelques retraites où l’âme se retrempe dans la solitude et la méditation.
  3. La science des choses. Et la contemplation de l’ordre univer-