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LIVRE IX, § XXXIII.

nivers entier, en songeant à l’éternité du temps, au changement rapide de chacune des parties de ce monde, à l’intervalle si étroit qui sépare leur naissance de leur destruction, à l’abîme sans fond qui a précédé leur existence, et à l’infini non moins insondable qui suivra leur dissolution.

XXXIII

Tout ce que tu vois sera détruit[1] dans un instant, et ceux aussi qui observent cette destruction inévitable seront eux-mêmes non moins vite détruits. On a beau mourir dans la plus extrême vieillesse, on en est au même point[2] que celui qui a trouvé la mort la plus prématurée.

    carrière. C’est là, en effet, un des moyens les plus assurés de se fortifier l’âme et de se consoler de bien des soucis. L’esprit se retrempe dans cette haute et pure atmosphère ; et il a plus d’énergie, après cette diversion, pour dédaigner les vaines préoccupations de la vie. La contemplation de l’être infini, de l’éternité du temps, de l’immensité de l’espace, soutient, guérit et vivifie. C’est le grand côté de l’homme et le rachat de son infirmité.

  1. Tout ce que tu vois sera détruit. Voir plus haut, liv. IV, §§ 3 et 50. Nous ne saurions mieux dire aujourd’hui ; et cette brièveté de toutes choses est une des idées les plus utiles à se remettre sans cesse dans l’esprit. Bien comprise, elle n’inspire ni découragement ni paresse ; mais elle met l’homme et le monde à leur véritable point.
  2. On en est au même point. Ceci est un peu exagéré. Devant la mort tout s’anéantit également ;