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LIVRE IX, § IX.

VIII

C’est une seule et même âme[1] qui fait vivre les animaux privés de raison ; c’est une seule et même âme intelligente qui est répartie entre les êtres raisonnables, de même qu’il n’y a qu’une seule et même terre pour toutes les choses terrestres, de même qu’il n’y a qu’une seule et même lumière qui nous fait voir tout ce qui est visible, de même qu’il n’y a qu’un seul et même air que respirent tous les êtres animés.

IX

Tout être qui a quelque chose de commun[2] avec un autre être se porte invinciblement vers son semblable. Tout objet terreux se dirige spontanément vers la terre ; toute particule liquide

  1. Une seule et même âme. Il ne faut pas prendre ceci au pied de la lettre, ni attribuer à Marc-Aurèle un panthéisme aveugle, qui n’est pas le sien. Il vient de montrer dans les paragraphes précédents qu’il distingue profondément son âme propre de celle de ses semblables ; et il n’admet pas une confusion qui serait la négation de toute responsabilité personnelle. Voir plus haut, liv. VIII, § 56 ; liv. VII, § 55, et passim.
  2. Tout être qui a quelque chose de commun. Tout ce long développement a pour objet de blâmer les hommes qui ne ressentent pas, pour les autres hommes, cette bienveillance que doivent avoir entre eux des êtres de la même espèce et de la