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LIVRE VIII, § VIII.

dans tout ce qu’il est, et d’un autre tout considéré de même dans sa totalité entière.

VIII

Il ne t’est plus possible de lire[1], soit ; mais ce qui t’est toujours possible, c’est de repousser de ton cœur l’insolence ; il t’est toujours possible de te raffermir contre les plaisirs et les peines ; il t’est possible de te mettre au-dessus de la vaine gloire ; tu peux ne pas t’emporter contre les gens qui ne sentent pas tes bienfaits, et qui les paient d’ingratitude ; il t’est même toujours possible de continuer à leur faire du bien[2].

    ment celle-ci : « Pour bien juger du destin de deux individus que l’on compare, il ne faut pas s’arrêter à un détail ; il faut prendre la vie entière de l’un et de l’autre, et apprécier les deux existences dans leur totalité. »

  1. Il ne t’est plus permis de lire. Il est possible que ceci fasse allusion à quelque infirmité prématurée dont Marc-Aurèle aurait été atteint. On ne connaissait pas de son temps l’art de l’opticien et tous les moyens que nous avons pour suppléer à l’affaiblissement naturel de la vue. Dans un autre passage, on a vu liv. II, § 2, que Marc-Aurèle, tout en faisant le plus grand cas de l’étude, trouve cependant qu’à un certain moment de la vie, il faut laisser les livres de côté. D’ailleurs il a raison ; et, quelle que soit la situation de santé où l’on soit, il reste toujours bien des vertus qu’on peut exercer malgré la défaillance des organes.
  2. À leur faire du bien. C’est une idée qui peut toujours consoler de l’ingratitude que l’on rencontre ; continuer de faire du bien aux gens, c’est souvent un moyen de les corriger et de provo-