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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.
V
D’abord ne te trouble pas[1] ; car tout s’accomplit selon les lois de la nature universelle ; et dans un temps qui ne peut pas être bien long, tu ne seras absolument rien, pas plus que ne sont à cette heure Adrien ou Auguste[2]. Puis, fixant ton esprit sur la chose en question, vois clairement ce qu’elle est, et rappelle-toi sans cesse que tu dois être homme de bien[3]. Souviens-toi de ce que veut la nature de l’homme ; et satisfais à ses exigences, sans jamais t’y soustraire. Que tes paroles n’expriment que ce que tu crois le plus juste ; seulement, parle toujours avec bienveillance, modestie et franchise[4].
- ↑ D’abord ne te trouble pas. C’est le premier précepte ou tout au moins un des premiers préceptes du Stoïcisme. J’ai déjà dit pourquoi. Voir liv. VII, § 73, note. C’est qu’avant tout, pour bien juger les choses, il faut être le plus calme possible afin que la raison ait tout son empire et toute sa lucidité.
- ↑ Adrien ou Auguste. Ce souvenir de deux empereurs doit faire croire que Marc-Aurèle s’adresse directement à lui-même cette réflexion, et que l’apostrophe à la seconde personne n’est pas simplement une figure de rhétorique.
- ↑ Tu dois être homme de bien. Marc-Aurèle applique le conseil qu’il se donne ; et il est homme de bien dans toute sa conduite, après s’être dit qu’il doit l’être. C’est un exemple plus efficace encore que ses recommandations.
- ↑ Franchise. C’est l’horreur du mensonge, un des vices les plus dangereux et les plus habituels de l’homme.