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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

cipe qui veut qu’en cela comme en tout le reste, les moins bonnes choses soient faites en vue des meilleures[1] ; et les êtres raisonnables sont faits les uns pour les autres. Voilà pourquoi, dans l’organisation de l’homme, le devoir supérieur, c’est d’abord d’être dévoué à l’intérêt de la communauté[2] ; en second lieu, c’est de ne point se livrer aux entraînements du corps[3] ; car le propre de l’activité raisonnable et intelligente, c’est de se fixer des bornes à elle-même, et de ne point se laisser vaincre ni à la séduction des sens ni à celle des passions. Ces deux derniers principes, ceux des sens et des passions, sont en effet purement animaux, tandis que l’entendement revendique la première place et ne peut être dominé par aucun d’eux. L’entendement a pleinement droit à cet empire, puisque la nature veut précisément que ce soit lui qui se serve des principes inférieurs. Enfin, en troisième et dernier lieu, l’organisation douée de raison a ce privilége de

    culière de l’être.

  1. Les moins bonnes choses soient faites en vue des meilleures. Grand principe cent fois proclamé par Aristote. Voir notamment sa Politique, liv. I, ch. I, § 4, pag. 4 de ma traduction, 3e édition ; et passim dans ses œuvres.
  2. L’intérêt de la communauté. Il faut entendre ce mot dans le sens le plus large. Il ne s’agit pas seulement ici de la société civile, mais de l’ordre universel des choses.
  3. Ne point se livrer aux entraî-