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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

d’habiles orateurs, tant de graves philosophes, Héraclite, Pythagore, Socrate ; tant de héros des âges antérieurs, tant d’hommes de guerre venus après eux, tant de tyrans. Ajoute à tous ces noms un Eudoxe[1], un Hipparque, un Archimède, et une foule de tant d’autres natures d’esprits, ceux-ci pénétrants, magnanimes, laborieux, ceux-là capables de tout, égoïstes, railleurs impitoyables de la vie même de l’homme, si mêlée, si éphémère, un Ménippe[2] par exemple, et tous ceux de son espèce. Compte un peu depuis combien de temps ils gisent en terre. Qu’y a-t-il donc là de si terrible pour eux ? À plus forte raison, quel malheur est-ce donc pour ceux dont le nom n’a pas même survécu ? Ainsi, il n’y a vraiment qu’une seule chose qui soit digne du plus grand prix : c’est de traverser la vie, dévoué à la vérité et à la justice, et doux envers les hommes[3], bien qu’ils soient trompeurs et méchants.

    grande estime.

  1. Un Eudoxe. Sans doute le disciple de Platon.
  2. Un Ménippe. C’est le philosophe cynique si fameux par ses satires, et dont le souvenir a fourni chez nous le titre de la Satire Ménippée.
  3. Doux envers les hommes. Voir plus haut dans ce liv. § 20, et liv. II, § 1.