Page:Pensées de Marc-Aurèle, trad. Barthélemy-Saint-Hilaire.djvu/166

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
144
PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

ce qui lui arrive, soit pour faire parade de sa force d’âme, conserve son équilibre et demeure impassible au mal. On peut donc s’étonner que l’ignorance ou la vanité aient plus d’effet et de puissance que la sagesse[1].

XIX

Il est bien entendu que les choses elles-mêmes n’ont pas le moindre contact avec notre âme[2]. Elles n’y ont pas d’accès possible ; elles ne peuvent ni la changer ni la mouvoir. L’âme seule a la puissance de se modifier elle-même et de se donner le mouvement ; et c’est d’après les jugements qu’elle croit devoir porter qu’elle façonne à son usage les choses du dehors.

    veloppements de cette pensée, qui, à première vue, peut ne pas paraître très-juste. Il ne faut pas d’ailleurs perdre de vue que les préceptes de Marc-Aurèle ne s’adressent qu’au sage, ou du moins qu’à celui qui veut le devenir. Comme il ne doit pas craindre la mort, à plus forte raison peut-il braver tous les accidents de la vie, quels qu’ils soient.

  1. Plus d’effet que… la sagesse. C’est là en réalité l’ordinaire de la vie. Mais la sagesse doit évidemment l’emporter sur l’ignorance, qui ne sait ce qu’elle fait, et sur la vanité, qui n’a que des motifs insuffisants pour agir.
  2. N’ont pas le moindre contact avec notre âme. C’est peut-être dire trop. Les choses n’ont pas de contact matériel avec notre âme ; mais, par l’intermédiaire des sens, elles agissent sur nous d’une manière puissante, et quelquefois même à peu