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LIVRE V, § XVI.

but véritable de l’homme ; car ce n’est pas là non plus que se rencontre le bien, qui est la perfection même de ce but. Ajoutez que, si les choses de cet ordre appartenaient réellement à l’homme, il ne pourrait pas appartenir à l’homme de les dédaigner, et même de s’en détacher ; l’homme ne serait pas digne de louange, comme il l’est, quand il s’exerce à savoir s’en passer. Celui qui, pour une des choses de cette espèce[1], s’impose des privations personnelles, ne serait pas un homme de bien, si ces choses-là étaient des biens véritables. Mais à cet égard, plus on se retranche à soi-même de ces prétendus biens et de tout ce qui leur ressemble, ou même plus on s’en laisse volontairement retrancher quelque chose par les autres, plus on a de vertu[2].

XVI

Telles seront les pensées que tu nourriras habituellement[3], tel aussi sera ton esprit ; car

    plus claire et plus pratique.

  1. Des choses de cette espèce. Richesse, santé, force, gloire, etc.
  2. Plus on a de vertu. En effet la vertu consiste surtout dans la résistance de l’âme aux exigences de la matière et du corps.
  3. Les pensées que tu nourriras habituellement. De là, la nécessité d’écarter de l’âme, autant qu’on le peut, toutes les