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LIVRE V, § VIII.

prescrit pour tel homme la maladie, la mutilation d’un membre, la perte des êtres les plus chers, ou telle autre épreuve non moins pénible. » Et quand je dis « Prescrit, » cela signifie, d’une part, que le médecin a ordonné ses remèdes en vue de la santé, et d’autre part, que tout ce qui arrive à chacun de nous est également ordonné pour nous conformément au destin. Et encore, lorsque nous disons que tout est arrangé pour nous, c’est au sens où les ouvriers le disent des pierres carrées des murs et des pyramides, qui s’arrangent entre elles et s’encastrent régulièrement, selon la disposition qu’on leur donne. Dans la totalité des choses, il n’y a qu’une seule et unique harmonie[1]. Et de même que l’univers, qui est le corps immense que nous voyons, est rempli et se compose de tous les corps particuliers, de même, le destin, qui est la cause que nous savons, se compose de toutes les causes particulières[2].

L’opinion que j’exprime ici est aussi celle des gens les plus simples ; car on entend dire à tout moment : « C’était là son sort. » Oui, certes ;

    son Esculape.

  1. Il n’y a qu’une seule et unique harmonie. Voir une pensée analogue plus haut, liv. IV, § 40.
  2. De toutes les causes particulières. Et l’homme est une de ces causes, grâce à