quand on ferme l’œil de l’entendement ; un mendiant, quand on a besoin d’autrui et qu’on ne sait pas se procurer par soi-même[1] tout ce qu’il faut pour vivre ; une superfétation du monde, quand on s’y dérobe et qu’on s’isole de l’existence de la commune nature[2], en se révoltant contre ce qui arrive[3] ; car c’est elle qui produit les événements, comme c’est elle qui t’a produit toi-même ; enfin, on n’est plus qu’un fragment détaché de la cité, quand on détache[4] son âme de celle des êtres raisonnables, dont on brise ainsi l’unité.
XXX
Celui-ci, quoique sans tunique[5], n’en est pas moins philosophe ; celui-là sait l’être même sans livres[6] ; tel autre sait l’être aussi quoique à moitié
- ↑ Se procurer par soi-même. Ceci est bien remarquable dans la bouche d’un empereur.
- ↑ La commune nature. Que le stoïcisme confond trop souvent avec Dieu.
- ↑ En se révoltant contre ce qui arrive. Conseil de résignation volontaire et intelligente.
- ↑ Un fragment détaché… Quand on détache. La répétition est dans le texte, et la traduction a dû la conserver.
- ↑ Sans tunique. La tunique était un vêtement de dessous ; et il n’y avait que les gens les plus pauvres qui ne la portassent pas. Plus haut, liv. I, § 6, Marc-Aurèle a parlé de tous les ustensiles dont se compose la discipline des philosophes grecs. Le vêtement était réglé tout aussi bien que l’ameublement.
- ↑ Sans livres. Marc-Aurèle proscrit l’usage excessif des livres quand on
partie, et dont il doit s’occuper plus encore que de la société civile où il est placé.