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intéresser assez peu, en, dépit du blâme de ce qu’elle appelle « le poulailler de Stockholm ».

Le mari meurt et Sophie retrouve encore le « bonheur » sous la forme d’un homme qui l’aime. Il est titré, riche, instruit, il lui plaît, mais pour épouser le « bonheur * voudrait que Sophie renonçât à la science et à sa chaire professorale ; elle préfère la gloire.

« Femme, ose être » a dit Félix Pécauît. Toute la vie de Sophie Kovalewsky est le contraire de cette pensée, elle n’ose pas être, en dépit des autres, ce qu’elle est.

Sophie Kovalewsky n’aime pas du tout la vie fémi¬ nine, elle lui préfère le travail intellectuel mais elle voudrait que cela ne se sache pas, parce que les préjugés de son éducation lui en font une honte ; alors elle se répand en puérilités. -— Je ne suis pas une savante, lui fait dire son maître Weierstrass, dans un éloge humour i s tique ; je n’ai pas fait de travaux, non.,, non. Je ne suis rien qu’une pauvre petite fille qui voudrait bien qu’on l’aime un peu et qu’on lui donne une orange. — Sophie répondit que ce portrait était, en effet, le sien, et elle éclata en sanglots. C’était une slave, elle tenait de sa race une nervosité que nous considérerions comme anormale, mais qui est fréquente eu Russie. On pourrait penser aussi qu’elle jouait la comédie de la féminité pour se faire pardonner sa supériorité intellectuelle. Cela a dû être, en effet, dans une certaine mesure, mais il est pro¬ bable qu’il y avait un peu de sincérité dans une atti¬ tude qui donne bien l’impression du génie féminin déformé par la servitude sociale.

On peut donner aussi, en quelque mesure, du génie à Sophie Germain, mathématicienne française