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peuvent rien contre le génie véritable. Comment le savoir ? Les génies que l’on connaît sont précisé¬ ment ceux qui ont triomphé ; lorsqu’ils ont trouvé des difficultés, on peut dire que ces difficultés ont pu être vaincues ; mais cela ne prouve pas que les hommes de génie doivent vaincre les obstacles et encore moins que les obstacles favorisent le génie.

La petite quantité de vérité qui reste au fond de tout ce qu’on a dit sur ce sujet, c’est que les diffi¬ cultés peuvent jouer ic-rôle d’excitant. Il y a une question de proportion entre la volonté de l’homme et la résistance des circonstances. Si la volonté est la plus forte, le génie triomphe ; si les circonstances contraires remportent, le génie est étouffé ou reste méconnu.

Le génie de Stuart Miil se développa sans obsta¬ cles. Après avoir reçu de son père une éducation tout à fait exceptionnelle, il produisit à son tour et monta beaucoup plus haut que lui.

Certains auteurs tombent dans l’excès contraire à celui que nous critiquons. Four ceux-ci, les circons¬ tances ne sont rien, pour ceux-là elles sont tout. Ces philosophes prétendent que chaque génie reconnu pour tel a rencontré des circonstances favorables sans lesquelles ils n’auraient été qu’un homme ordinaire. Tout est ici question de proportions. Il est certain ; qu’un homme qu’on aurait depuis l’enfance enfermé dans une cave et sevré de tout commerce humain ne donnerait pas de productions géniales ; il serait même idiot, cela est plus que probable. Les exem¬ ples’ artificiels mis à part, c’est précisément le fait de la supériorité intellectuelle d’utiliser des circons¬ tances qui n’agiraient pas sur une intelligence mé¬ diocre. Victor Cousin dut son éducation à un incident