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ce soit, c’est un don magnifique dont la nature est avare ; il faut le recevoir avec reconnaissance lorsqu’il nous est envoyé, mais on ne saurait compter sur lui.

La question préalable étant ainsi résolue, demandons-nous ce qu’est le génie et s’il a vraiment un sexe comme quelques-uns le prétendent.

Lombroso s’est rendu célèbre en écrivant que le génie est une forme de la folie. Son système était fait pour être accepté des foules de culture moyenne. Au centre, l’homme normal, ni supérieur, ni inférieur, ni bon, ni mauvais, qui accepte la vie telle qu’elle est et la société comme on l’a faite, capable de comprendre le monde où il vit, il n’a ni les moyens, ni la volonté de le changer ; ouvrier, industriel, intellectuel, il tient sa place ; il se marie, amasse de l’argent et meurt après avoir procréé des enfants qui seront comme lui. À l’extrémité, disons à l’extrémité gauche de la ligne idéale dont l’homme normal tient le milieu est le criminel. C’est un réprouvé de la nature autant que de la société. Son corps est plein de tares, dissymétries crâniennes, faciales, somatiques, caractères ancestraux[1] qui rappellent l’homme primitif, heredo-alcoolique, héredo-syphilis, épilepsie, folie ; tous les maux de la boîte de Pandore se sont abattus sur lui. Dans ces conditions il ne peut évidemment jouer son rôle social ; incapable d’adaptation, il devient révolté, anarchiste, voleur, assassin, souvent tout cela à la fois.

À l’extrémité droite est l’homme de génie. Mais ici notre image ne cadre plus, car si dans l’Écriture les

  1. Voir la critique du système lombrosien dans Manouvrier : Les Aptitudes et les Actes.