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outre, n’a rien d’attrayant pour elle ; elle s’enquiert donc des moyens de faire « passer ça », suivant son expression, et le plus souvent elle y arrive.

Grâce à l’avortement, des situations, qui ne pouvaient se dénouer autrefois que par une tragédie, sont aujourd’hui presque simples. Une de mes amies, femme de lettres connue, avait pendant de longues années attendu auprès de sa mère le mariage. Elle avait une cinquantaine de mille francs de dot, et elle voulait un mari de son éducation et de son rang social ; elle n’en trouva pas, et à trente ans elle prit un amant. Intelligente, instruite, un peu libérée des préjugés de son milieu, elle savait de l’amour tout ce qu’on peut en apprendre par les lectures et les conversations ; elle connaissait les pratiques néo-malthusiennes, mais tout cela était naturellement théorique. L’amant qu’elle prit lui assura qu’avec lui la grossesse n’était pas à craindre, elle le crut ; au bout de deux mois de liaison, elle était enceinte. Elle songea d’abord à l’avortement ; mais les allures mystérieuses des personnes auxquelles elle s’adressa l’effrayèrent ; elle craignit de mourir baignée dans son sang, comme la jeune personne de Zola (Fécondité) et, après bien des tergiversations, elle finit par avouer son état à sa mère. La mère, une bourgeoise toute aux idées de sa géné-