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II


Chez les animaux, la lutte des individus les uns contre les autres est la règle. Les espèces carnivores mangent les herbivores et se dévorent entre elles. Un proverbe affirme que les loups ne se mangent pas entre eux, mais il doit être faux. J’ai observé nombre de fois les rats et les souris s’entre-dévorer et il serait étrange que seuls les rongeurs eussent ce privilège. Seule la maternité vient mettre un peu d’amour dans la guerre universelle et encore pas toujours. Des lapines, des chattes, des rattes et des souris dévorent à belles dents les petits qu’elles viennent de mettre bas. D’autres refusent de les allaiter ; les cris des pauvres petits affamés les laissent indifférentes.

Chez l’homme, on peut dire que la lutte est aussi la loi universelle ; l’amour est une lutte et l’amitié n’est pas durable.

Mais si la civilisation et la culture n’ont pas réussi à supprimer l’esprit de combativité, elles en ont à mesure des temps modifié la forme.

Le duel a disparu de nos mœurs et, pendant le dernier demi-siècle, on peut dire qu’il était une façon de se faire valoir plutôt qu’un combat véritable ; les balles étaient échangées sans résultat, les assauts à l’épée se terminaient par une égratignure au pouce (dite coup de Joseph). La mort était extrêmement rare et toujours le fait d’un accident, tireur maladroit, escrimeur qui s’enferrait sur l’épée de son adversaire. Dans les classes cultivées, on trouve fréquemment des hommes qui déclarent n’avoir jamais donné ou reçu un coup de poing dans tout le cours d’une longue vie. Pour trouver la lutte matérielle, il faut aller dans le peuple et encore, si l’alcoolisme ne sévissait pas, la