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former un bon citoyen, car qui dit bon chrétien dit bon citoyen, et qui dit bon citoyen, dit bon chrétien. Pourquoi refuser tyranniquement ces connaissances que les parents sollicitent avec tant d’empressement, quand vous leur en imposez officiellement d’autres qu’ils repoussent si énergiquement.

Mais qu’on ne se méprenne pas sur la portée de mes paroles. Quand j’insiste sur le caractère chrétien de l’instruction à être donnée aux enfants, je ne veux point dire que tout le temps de l’école doit être employé à des exercices religieux, à l’étude de la religion, et que le maître doit faire dire à ses élèves, tout le temps, des oraisons et des chapelets... Point du tout ; chaque chose à son temps et à sa place ; il ne faut pas plus exagérer l’usage des choses religieuses que l’usage des choses profanes ; pas plus les pratiques pieuses que l’étude des connaissances ordinaires. Ce que je veux dire, c’est que l’instruction doit être chrétienne. C’est là le principe, et il est facile d’en faire une application intelligente, sans commettre de ces exagérations qui sont, je regrette de le dire, par trop fréquentes, en certains lieux, ou du moins en certains esprits. « Est modus in rébus », comme disait le poète latin. Pas de moyen plus sûr de perdre ce que l’on a qu’en faisant des demandes exagérées. C’est la raison de la fable : perdre la réalité en courant après l’ombre.

J’ai dit en second lieu que l’instruction doit être pratique : j’entends par là qu’elle doit être en harmonie avec les besoins de l’époque et de la vie sociale au milieu de laquelle on vit.

Les moines pouvaient passer toute leur vie à étudier le latin, le grec, l’astronomie et à acquérir d’autres connaissances fort remarquables et très utiles dans les cloîtres ; il faut avouer que tout le monde ne peut devenir moine ou astronome et que certaines sciences, belles et louables en elles-mêmes, seraient peu utiles à nos manufacturiers, à nos commis et à nos artisans, et que ces sciences tout intéressantes qu’elles soient, ne mèneraient pas loin ceux qui voudraient s’en contenter, à notre époque et surtout dans nos villes d’Amérique.

Ceux qui ont le temps et les moyens d’apprendre le latin et le grec, l’astronomie et les autres sciences de cette nature, font bien de les apprendre ; mais pour qu’elles leur suffisent dans le monde il faut qu’ils aient la fortune. Or, comme je n’ai pas à m’occuper