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ŒUVRES P S T H U M E S tout. Et surtout, quand elles nous servent à nous, elles rendent moins de services aux solanées d'où nous les retirons. Et dans les animaux même il y en a. Pas des pommes de terre, des fonctions d'épargne. Mais elles ne sont pas tout. La graisse n'est pas tout l'homme. Ce système du progrès en caisse d'épargne est au fond, mon ami, vous le voyez, un système adipeux. La nature, vous le savez, la réalité, l'orga- nique se gouverne aussi par d'autres lois. Il y a une déperdition, une perte perpétuelle, une usure, un frot- tement inévitable, qui n'est point d'accident, qui est dans le jeu même, dans les règles du jeu, dans les lois ou plutôt dans la loi, dans le mécanisme et dans l'automatisme, enfin dans le mécanisme au sens et dans la mesure où dans l'organisme, dans tout organisme il y a le mécanisme. Il y a une déperdition perpétuelle, une usure, un frottement, un irréversible qui est dans la nature même, dans l'essence et dans l'événement, au cœur même de l'événement. D'un mot il y a le vieillissement. Ces malheureux supposent, mon ami, leur système suppose que le temps serait uniquement un temps pur, un temps géométrique, un temps spatial, une ligne absolue, infinie (au moins par sa termi- naison, si je puis dire, sinon par son origine), un temps imaginaire, arbitraire, imité de l'espace, fait comme un espace, fait à l'image et à la ressemblance de l'es- pace, un temps fait, factice, arbitraire, trop bien fait, une pure ligne pure, parfaitement continue, parfaite- ment homogène, au long de laquelle, comme au long

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