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ŒUVRES POSTHUMES

d'un temps et d'un peuple, une théorie fabriquée par les intellectuels, par le parti intellectuel d'un temps et d'un peuple qui venaient d'entrer dans l'âge bourgeois, dans leur âge bourgeois, dans l'âge et dans leur âge capitaliste, où toutes les forces et toutes les sèves et toutes les sources et tous les instincts de la force des races, où tous les obscurs et clairs instincts organiques, où toutes les (anciennes) poussées du sang des races diminuaient, allaient eux aussi s'effacer, allaient à leur tour s'écraser sous le pouce, comme un trait fatigué, allaient s'obnubiler (pour quel temps ?) devant la montée des nouveaux instincts, instincts acquis, des instincts modernes, des instincts intellectuels, devant la montée des instincts sordides, le grand triomphe du monde moderne : épargne et capitalisation, avarice, ladrerie, économie(s), cupidité, dureté de cœur, intérêt(s) ; caisse d'épargne et recette buraliste. C'est bien une théorie d'une capitalisation non seulement à intérêts, mais à intérêts composés. Le monde moderne se retrouve ici, se contemple et se complaît, se chérit en une de ses institutions essentielles. Et ce tout se vérifie en une de ses parties. Car cette théorie du progrès revient essentiellement à être une théorie de caisse d'épargne. Elle suppose, elle crée une petite caisse d'épargne intellectuelle particulière automatique pour chacun de nous, automatique en ce sens que nous y mettons toujours et que nous n'en retirons jamais. Et que les apports d'eux-mêmes s'ajoutent infatigablement toujours. D'ensemble, et universellement, elle suppose,

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