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œuvres posthume; S

que nous avons entendu. Mais il se produit encore, il se produit en outre un effet propre, un effet très particulier d'optique et pour ainsi dire d'arithmétique temporelle. Je m'explique.

Quand le siècle présent, quand Hugo, quand la géné- ration présente fait appel à la postérité, c'est-à-dire aux siècles ultérieurs, aux générations ultérieures, il ne croit pas seulement, il ne se fait pas seulement croire que ces générations sont compétentes, il ne croit pas seulement, il ne se fait pas seulement croire qu'elles sont inoccupées ; qu'elles sont de loisir, pour lui ; qu'elles sont pour ainsi dire de service, pour lui; qu'elles sont pour ainsi dire de garde, pour lui. Il croit aussi, (en perspective, en arith- métique), il veut se faire croire, il veut les voir, il ne veut pas les voir seulement à sa disposition, il veut les voir indéfiniment nombreuses, indéfiniment ultérieures, indéfiniment développées et poussées en avant dans l'avenir. Et il veut les voir indéfiniment et par suite définitivement maîtresses d'un jugement définitif parce qu'étant indéfiniment échelonnées dans le futur elles lui paraissent, il veut qu'elles lui paraissent tenantes d'un temps définitif, d'un jugement, d'un arrêt définitif.

Étant tenantes d'un temps qui sera le dernier, qui aura le dernier mot, au moins en ce sens que le dernier n'arrivera jamais, que le dernier temps, que le dernier mot sera reculé toujours, sera toujours à venir.

Et par suite sera toujours à disposition, sera toujours comme sous la main. Lui-même sera toujours pour ainsi dire de loisir.

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