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veux dire notre parti, nos politiciens. Car il ne s’agit pas de nous mêmes. C’est un retour en arrière, une répercussion en arrière, une répercussion remontante, reportée, en arrière, réversible, réversée, reportée sur tout ce que nous avions dit, sur tout ce que nous avions fait, sur tout ce que nous avions été. Quand nous repoussions l’accusation d’être un traître repoussant profondément l’idée même d’être un traître, on pouvait nous combattre, mais au moins nous nous faisions écouter. Quand au contraire nous repoussons l’accusation d’être un traître accueillant profondément l’idée d’être un traître, comment ne pas voir que nous devenons instantanément suspects. Que nous perdons l’audience même.

Et même l’audience que nous avions déjà, eue, obtenue. L’ancienne audience.

Une audience qui paraissait acquise.

Une audience aujourd’hui annulée.

On peut se déshonorer en arrière.

Jaurès ici intervient, au débat, et se défend. Si je reste avec Hervé, dit-il, dans le même parti, si j’y suis resté constamment, toujours, si longtemps, malgré les innombrables couleuvres que Hervé m’a fait avaler, c’est pour deux raisons également valables. Premièrement c’est précisément, c’est à cause de ces innombrables couleuvres mêmes. Il faut bien songer que ce Hervé est l’homme du monde qui m’a administré le plus de coups de pied dans le derrière. En public et en particulier. Dans les congrès et dans les meetings. Dans son journal. Publiquement et privément, comme dit