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LÉON DIERX


Léon Dierx est né à la Réunion, comme Leconte de Lisle. Il vint à Paris suivre les cours de l’École Centrale, puis entra dans l’Administration et se voua uniquement à la poésie. Il a publié Poèmes et Poésies (1864), les Lèvres closes (1807) et, en 1879, les Amants. Son œuvre est noble et grave, comme fut sa vie. Les jeunes poètes lui firent l’honneur de le choisir pour leur prince, après la mort de Stéphane Mallarmé. Son meilleur recueil est sans doute les Lèvres closes, où figure l’admirable poème de Lazare. Ces quelques strophes, d’une beauté supérieure, feront durer le nom de Léon Dierx aussi longtemps que la langue française elle-même.

André RIVOIRE. 

IMPÉRIA

Sur le divan, pareille à la noire panthère
Qui se caresse aux feux du soleil tropical,
Dans un fauve rayon enveloppant le bal,
Elle emplit de parfums le boudoir solitaire.
Elle rêve affaissée au milieu des coussins ;
Et sa narine s’enfle, et se gonflent ses seins
Au rythme langoureux de la valse lointaine.
Les rires étouffés, les longs chuchotements
Qui voltigent là-bas à l’entour des amants,
Rehaussent le dédain de sa lèvre hautaine.
Paisible, dans la nuit où se plonge son cœur,
Sphinx cruel, elle attend son Œdipe vainqueur.
Elle hait les aveux et les fades paroles,
Les serments, les soupirs connus, les soins d’amour
Reine muette, elle a pour ces flatteurs d’un jour
Le mépris sans pitié des superbes idoles.
Dardant ses larges cils d’un air olympien,