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de haut en bas. On me fit monter un escalier étroit et puant, enfin on s’arrêta au quatrième étage. Mon gardien frappa à une porte ; ce bruit fit apparaître un petit soldat à moitié endormi. Mon gardien et lui se mirent à chuchoter, puis on me fit passer dans un petit greffe agencé à l’ancienne mode. Mon gardien y entra en pourparlers mystérieux avec un tchinovnik[1] fripé, apparu on ne sait d’où.

Ce personnage avait une cravate d’un rouge éclatant et un visage couleur jaune-citron. Toute sa physionomie respirait la fatigue des mauvais lieux.

Je vis une petite glace appendue au mur et je m’y regardai, je reculai d’épouvante. Était-ce bien moi ! Avant mon emprisonnement, j’avais le teint fleuri de la santé, je n’avais guère de barbe. Maintenant j’étais jaune et pâle, mes yeux caves brillaient d’un feu malsain. Une barbe noire et de longs cheveux emmêlés me donnaient l’air d’un fou.

On me fit approcher d’une table, on m’adressa quelques questions, on me fit signer je ne sais plus quoi ; puis on se mit à me fouiller. Le soldat endormi qui nous avait ouvert la porte fourra ses mains dans mes poches, les inspecta, les retourna, me palpa, me fit ôter mon habit, déboutonna mon pantalon. Une de mes bottes était trouée, le soldat fourra son doigt dans le trou y cherchant aussi quelque chose. Je croyais que cela n’en finirait jamais.

  1. Employé