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deux sœurs en justes noces. Avouez que ce sera un peu plus moral que de vous suicider bêtement tous les trois au printemps de la vie, comme on disait autrefois.

— C’est ma foi vrai ; je vais tâcher de les décider et, après ces diverses formalités, devenus tous trois Turcs naturalisés et mahométans, nous pourrons revenir en France. Autrement, nous serions poursuivis pour le crime problématique de bigamie par nos lois imbéciles.

— Évidemment…

Depuis, dix ans se sont passés ; j’ai moi-même voyagé, mais je viens de rencontrer mon ami. Il m’a emmené dîner chez lui, au sein de sa famille.

Mues par un amour profond et sérieux, ses deux jeunes fiancées l’ont suivi à Constantinople. Aujourd’hui ils sont tous trois convertis à l’islamisme et naturalisés Turcs. Mon ami a deux femmes légitimes qui continuent à adorer et deux bébés charmants.

Il porte un fez sur la tête et s’estime l’homme le plus heureux du monde.

Ses deux femmes et lui me sont tombés dans les bras en pleurant de joie avant le potage, me disant :

— C’est à vous que nous devons notre bonheur. Voyez quel joli ménage à trois et légitime encore, formé par nous, et tout cela est votre œuvre, puisque vous seul avez trouvé la solution juste et pratique !

Je me défendis avec modestie et comme les