Page:Pascal - Pensées, 2e édition G. Desprez, 1670.djvu/242

Cette page a été validée par deux contributeurs.

condition par votre raison naturelle ? Vous ne pouvez fuir une de ces sectes, ni subsister dans aucune.

Voilà ce qu’est l’homme à l’égard de la vérité. Considérons-le maintenant à l’égard de la félicité qu’il recherche avec tant d’ardeur en toutes ses actions. Car tous les hommes désirent d’être heureux ; cela est sans exception. Quelques différents moyens qu’il y emploient, ils tendent tous à ce but. Ce qui fait que l’un va à la guerre, et que l’autre n’y va pas, c’est ce même désir qui est dans tous les deux accompagné de différentes vues. La volonté ne fait jamais la moindre démarche que vers cet objet. C’est le motif de toutes les actions de tous les hommes, jusqu’à ceux qui se tuent et qui se pendent.

Et cependant depuis un si grand nombre d’années, jamais personne sans la foi n’est arrivé à ce point, où tous tendent continuellement. Tous se plaignent, Princes, sujets ; nobles, roturiers ; vieillards, jeunes ; forts, faibles ; savants, ignorants ;