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Voilà donc la guerre ouverte entre les hommes. Il faut que chacun prenne parti, et se range nécessairement ou au Dogmatisme, ou au Pyrrhonisme ; car qui penserait demeurer neutre serait Pyrrhonien par excellence : cette neutralité est l’essence du Pyrrhonisme ; qui n’est pas contre eux est excellemment pour eux. Que fera donc l’homme en cet état ? Doutera-t-il de tout ? Doutera-t-il s’il veille, si on le pince, si on le brûle ? Doutera-t-il s’il est ? On n’en saurait venir là : et je mets en fait qu’il n’y a jamais eu de Pyrrhonien effectif et parfait. La nature soutient la raison impuissante, et l’empêche d’extravaguer jusqu’à ce point. Dira-t-il au contraire, qu’il possède certainement la vérité, lui qui, si peu qu’on le pousse, n’en peut montrer aucun titre, et est forcé de lâcher prise ?

Qui démêlera cet embrouillement ? La nature confond les Pyrrhoniens, et la raison confond les Dogmatistes. Que deviendrez-vous donc, ô homme, qui cherchez votre véritable