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ACTE II.
NYMPHE.

Que ie ſuis tout percé : Que me dis tu, bons Dieux !
Ie te puis aſſeurer que ton corps, ny tes yeux,
N’ont ny fleches, ny mal : regarde ie t’en prie

Comme ils ſont offencez :
Elle luy ouure les yeux elle meſme.
ENDYMION.

Comme ils ſont offencez : Diuine tromperie !
Et qu’ay ie fais grands Dieux, qui puiſſe meriter
Les coups que iay receus.

NYMPHE.

Les coups que iay receus. Prens garde d’irriter
La Deeſſe, & les Dieux : mais reconnois les graces
Que Diane te fait en quel lieu que tu paſſes :
Et ſçaches qu’au iourd’huy tu t’es mis au hazard,
De receuoir icy plus de cent coups de dard,
Des Nymphes, de long temps à qui Diane meſme
Donne tous ſes pouuoirs par ſa douceur extreme :
Et que les hommes font leurs cruels ennemis
Qu’on en a iamais veu à qui il fut permis
De ioüir vn moment de ſa douce preſence,
Sans que l’on n’ayt bien-toſt puny ſon imprudence :
Vois que pour contenter leur cruelle fureur,
Elle a trompé leurs yeux en te perçant le cœur.

ENDYMION.

Belle Nymphe dis moy, comme quoy la Deeſſe
Me traitte dans ſon ame ?

NYMPHE.

Me traitte dans ſon ame ? Auec plus de tendreſſe
Qu’elle n’en eut iamais pour les autres mortels,
Qui pour ſa gloire ſeule eſleuent des autels :
Ie ne peux aſſeurer qu’elle te favoriſe
Par deſſus les humains auec tant de franchiſe,