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Torche Néronienne, ô monstrueuse croix,
Où flambent des martyrs oints de graisse et de poix,
xxxxxxxxxxxxxxxxxxx Consumez-moi !

Prière

Ô Vous, femme adorable entre toutes les femmes,
Épouse des cœurs morts et sœur des jeunes âmes,
Reine des jours anciens, Reine des jours nouveaux,
Vous qui penchez un front empourpré de pavots,
Maîtresse du sommeil, Souveraine des veilles,
Ô Vous qui dans Saba régniez sur les merveilles ;
Vous qui fûtes au temps d’Assuérus Esther,
Baignant votre enfantine et précieuse chair
Six mois d’huile de myrrhe et six mois d’aromates ;
Vous qui domptiez le Nil sous vos galères plates,
Mangeuse de héros, buveuse de bijoux,
Cléopâtre ! — Ô princesse aux puissants cheveux roux,
Qui traîniez vos amants tout meurtris de luxure
Des carrefours de Rome aux jardins de Suburre,
Farouche Messaline, — ô large et sombre cœur,
Qui des taureaux crétois eût lassé la vigueur ; —
Vous, l’éternel amour, Vous, la femme éternelle,
Dévoratrice absurde, ignoble et solennelle,
Qui sucez notre vie et videz nos cerveaux,
Rallumez, rallumez, sous vos longs cils dévots,
Dans leurs globes laiteux comme un fluide ivoire,
Vos yeux de cendre où couve une âpre flamme noire ;