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cette même angoisse de la destinée, cette même recherche du bonheur, cette même lutte entre le désir individuel et l’ordre immuable, cette même succession d’ardent espoir et de morne désenchantement, d’immolation de soi-même et d’immolation des autres, qui constituaient pour le cœur agité et pour la pensée inquiète du maître le drame éternel de la vie humaine comme le drame passager de sa propre vie. L’histoire, où ces éléments ne sont pas moins en jeu, ne lui semblait pas se prêter aussi bien à fournir la base de l’interprétation rêvée : elle précise trop les caractères et les faits, en même temps que les événements y sont trop fortuits et ne naissent pas des données psychologiques et morales, tandis que les mythes et les légendes, n’étant que l’incarnation d’idées et de sentiments, subordonnent nécessairement les événements à ces données mêmes. En outre, le poète est beaucoup plus libre avec les légendes qu’avec l’histoire : il lui suffit de s’inspirer de l’idée qu’il croit y reconnaître ; il la développe ensuite à sa guise, comme ont fait à travers les siècles ceux qui nous les ont transmises en les variant à l’infini. Il fallait s’adresser au Moyen Âge plutôt qu’à l’Antiquité. Les chefs-d’œuvre classiques ont leur perfection en eux-mêmes : la poésie n’ose pas les transformer, la musique qu’on leur ajoute n’est qu’un ornement accessoire, un lierre qui