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mort de galehaut.

Il le savait vivant, hors de prison : il s’inquiétait d’un chagrin dont il devinait la cause. Que devra-t-il faire ? Le chercher en terres lointaines ? Mais par où commencer ? retourner en Sorelois ? quel deuil pour lui s’il ne l’y rencontre plus ! Il choisit pourtant ce dernier parti, quand il eut perdu tout espoir de le retrouver en Grande-Bretagne. Rentré dans ses États, il apprit qu’on avait vu Lancelot désespéré de le savoir absent ; que sa raison en avait reçu une nouvelle atteinte, et qu’on ignorait ce qu’il était devenu. Le sang dont il trouva rougi le lit dans lequel avait couché son ami lui donna à penser qu’il s’était donné la mort ; il s’accusa d’avoir été lui-même son meurtrier en tardant à revenir. Dans toutes ses terres, il envoya des messagers chargés de recueillir de ses nouvelles : quand ils revinrent sans l’avoir trouvé, il ne douta plus de sa mort. Ainsi, malade de corps et de cœur, il se mit au lit le jour de la Madeleine et ne se releva plus. Devant sa couche il fit placer l’écu de Lancelot ; mais cette vue, loin d’adoucir ses chagrins, contribuait encore à les augmenter. Pendant neuf jours et neuf nuits, il refusa toute espèce de nourriture. On le conjura de faire un effort sur lui-même et de consentir à manger ; mais il était trop tard. Sa langue était gonflée, ses lèvres se détachaient d’elles-mêmes, tous ses membres étaient des-