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les enfances.

neur devant Dieu et le siècle ; mais tu tardes trop à venger les injures qu’on te fait ; jusqu’à toi remonte la honte qu’on inflige à tes hommes. Tu oublies ceux qui t’ont servi noblement de leur corps, et qui ont perdu leur terre pour n’avoir pas voulu prendre un autre suzerain. »

Le roi rougit de confusion en écoutant ces paroles. Les chevaliers assis autour de lui laissaient le manger pour attendre ce que le prud’homme allait ajouter ; mais le connétable Beduer s’approchant de l’inconnu : « Sire rendu, » lui dit-il, « attendez au moins que le roi soit levé de table. Ne voyez-vous pas que vos paroles troublent le festin et que ces nobles chevaliers cessent d’y prendre part ? — C’est donc, » reprit le rendu, « que vous entendez m’empêcher de dire ce qui peut être de grand profit au roi, afin de vous donner tout le temps d’emplir et soûler un sac où les meilleures viandes doivent devenir ordes et infectes ! Dieu me garde de remettre à dire ce qu’il peut être bon d’entendre ! Qui êtes-vous pour me fermer la bouche ? Êtes-vous plus vaillant et mieux prisé que Hervis de Rinel et Kaheus de Cahors, les sénéchaux du roi Uter, dont Dieu ait l’âme[1] ? Ce n’est pas eux qui auraient em-

  1. On voit ici que cette laisse doit être prise d’un