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lancelot du lac.

devant eux sur l’herbe verte dont la salle était jonchée. Tous prenaient à le regarder grand plaisir, son beau costume relevant encore l’agrément répandu sur sa personne. « Dieu, dit aussitôt la reine, le fasse prud’homme ! car pour la beauté il a tout ce que mortel peut en avoir. »

La reine le regardait autant qu’elle le pouvait sans être remarquée, et lui ne se faisait faute de glisser les yeux sur elle, ne comprenant pas qu’une femme pût réunir une si merveilleuse beauté. Jusque-là, dans sa pensée, nulle ne pouvait soutenir la comparaison avec la Dame du lac ; quelle différence pourtant entre elle et la reine ! En effet, madame Genièvre était bien la Dame des dames, la fontaine d’où semblait couler tout ce qui pouvait enchanter les yeux : et s’il eût connu toute sa noblesse de cœur, toute sa bonté d’âme, il en eût encore été plus émerveillé. « Comment, dit-elle, a nom ce beau valet ? – Dame, répondit messire Yvain, je ne sais rien de lui. Je devine seulement qu’il est de la terre de Gaule, car il en a la parlure. » Alors la reine se penche vers le valet, le prend par la main et lui demande de quelle terre il est né. En entendant cette douce voix, en sentant cette main toucher la sienne, le valet tressaille, comme si on l’eût subitement éveillé. Il n’est plus à ce qu’on lui demande et il ne songe pas à répondre. La reine voit sa grande émotion dont peut-être elle