Page:Paris, Paulin - Commentaire sur la chanson de Roland, I.djvu/26

Cette page a été validée par deux contributeurs.
23

plus riche à cet égard, avait affatomie forme du latin affari. Et le terme est expliqué dans un capitulaire de l’an 817 : « De affatomie dixerunt quod traditio fuisset[1] (scilicet citationis). »

La parenthèse scilicet citationis est de M. Génin ; mais quand on devrait la sous-entendre, il y aurait encore bien loin de ce qu’il veut trouver dans l’affatomie. Il faut même un étrange mépris de tous les anciens textes de formules pour nous débiter cette interprétation d’un mot si bien expliqué par tous les jurisconsultes. L’affatomie est la déclaration dont l’objet était de transmettre la propriété. Louis le Débonnaire en ayant demandé une définition précise, les Francs, assemblés en 817, « dixerunt quod esset traditio. » Ils dirent que c’était la forme du transfert. L’affatomie se faisait d’une façon analogue à l’adhramitio, en jetant une paille dans le sein de celui qui recevait la transmission, et, suivant Eichhorn, le mot venait de l’anglo-saxon foeth, qui répondait au latin sinus. D’ailleurs, M. Génin a eu besoin de tout son esprit pour reconnaître dans la loi salique, où l’affatomia est alléguée, les traces d’un huissier signifiant un exploit et parlant à la personne.

Nous passerons sur la fleur d’orange et le jardin des olives, anciennes façons de parler démontrant qu’on disait une orange pour un oranger, une olive pour un olivier. À ce compte, Fontenay-aux-Roses et Montreuil-les-Pêches témoigneraient aujourd’hui que nous appelons rose un rosier, et pêche un pêcher. — C’est bien mal démontrer aussi que « la langue française était usuelle au temps le Charlemagne, » d’alléguer en preuve une chanson de geste du treizième siècle, Gérard de Viane. Passons à une question plus intéressante.

Il y a dix ans qu’un savant allemand, M. Bethmann, chargé de continuer les Monumenta Germaniæ historica de M. Pertz, fit un voyage dans le nord de la France, et découvrit, sur la garde d’un manuscrit de Valenciennes, un fragment de sermon demi-latin, demi-français, remarquable d’ailleurs par de nombreux signes d’abréviation, que plus tard un élève de l’École des chartes, M. Jules Tardif, parvint à lire et expliquer d’une manière satisfaisante. La relation de l’important Voyage historique de M. Bethmann dans le nord de la France a été publiée d’abord en allemand, puis traduite en 1849 par M. de Coussemaker, correspondant

  1. Dom Bouquet, VI, p. 424.