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LE THÉATRE D’HIER.

ancien camarade de fêtes, qui, au lieu de réparer son patrimoine par une mésalliance, s’est engagé dans un régiment d’Afrique et porte fièrement les galons de brigadier. Ils sont comme les confidents des protagonistes, destinés à prévenir les heurts trop violents, qui pourraient fausser la balance. Verdelet console Antoinette et retient Poirier ; le duc retient Gaston et console Antoinette. L’émotion dramatique ondule en un rythme sobre, souple, très classique, qu’accélèrent par instants les situations et combinaisons de théâtre.

L’exposition ne s’égare pas en discussions étincelantes et languissantes. C’est par leurs actions que ces caractères se font d’abord connaître. Et donc, M. Poirier, plusieurs fois millionnaire, a marié sa fille Antoinette à M. le marquis Gaston de Presles, authentiquement noble et ruiné. Le duc arrive, et Gaston, après ravoir plaisanté sur sa casaque de soldat, le renseigne sur le mariage qu’il a fait, sur le trésor de beau-père qu’il croit avoir découvert, avec quelques mots sur sa femme, une pensionnaire ébaubie de sa métamorphose, et force détails sur la vie qu’il mène, la grande vie, comme autrefois. Il y a même un duel dans l’air, « un joli petit duel, comme dans le bon temps », à propos d’une madame de Montjay, une comtesse à tout faire. Après ces confidences, arrive Poirier avec son associé Verdelet. On lui présente le duc ; on le prie de veiller à l’installation d’Hector, de tenir aux ordres de cet hôte le coupé bleu, celui de M. Poirier justement, tout cela de belle humeur, et d’un petit air de supériorité sans brusquerie. El l’on quitte Poirier et Verdelet pour visiter les chevaux : entre son beau père et son arabe pur sang Gaston fait une différence. À ces superficiels froissements Poirier acquiesce, ronronne et ne souffle mot. Il se « rattrape sur Verdelet des familiarités de son gendre », sur ce clairvoyant Verdelet qui lui reproche faiblesse avant le mariage, platitude après, qui est le parrain d’Antoinette, quia su s’en faire aimer au