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LE THÉÂTRE D’HIER.

moins de convention parisienne, de concession à la légende de la vie de Paris, qu’ils n’ont d’ailleurs pas peu contribué à former. Il y a là beaucoup plus de ce qu’on voit ou entrevoit dans la pénombre de certains salons mondains, où une discrète senteur d’encens monte, à la gloire — et à la tête de la femme-joujou, de la femme-froufrou. Une atmosphère de gâterie, de fleurette, de caprice et d’insouciance enveloppe ce château des Charmerettes, ainsi appelé d’un coquet diminutif qui lui sied. Brigard, le père, — non, certes, le père Brigard — ce La Musardière adouci,… qui, malgré ses cheveux teints et ses fredaines de vert-galant,… est tout de même père à sa façon, par à peu près,… comme il est amant, ou à peu près ; qui adore la plus fringante de ses filles et se prosterne devant l’autre… et qui peut-être préfère celle qu’il adore… parce qu’elle est plus femme… plus telle enfin qu’il les préfère et les adore toutes ; père malgré tout, plein de bonne volonté fortifiée de morale, par à-coup, de morale fragmentaire, intermittente, ébauchée, je ne dis pas débauchée… est un papa bien moderne et combien peu patriarche, surtout avec une toque féminine à la main ! Quelle silhouette encore que ce Valréas, irrésistible, léger, heureux de vivre et de faire le geste de l’amour ! Quelle désinvolture il déploie dans ses déclarations à pirouettes, moitié salon, moitié boudoir ! « Enfin, puisqu’il n’y a pas moyen de faire autrement… Mais je suis désolé… maintenant, j’en suis sûr, il ne me reste plus aucune chance de vous convaincre de mon… de ma… non, n’est-ce pas ? » Il a de la race. Allons, saute, marquis ! — Et jusqu’à cette frivole baronne de Cambri, qui émoustille tous ces papillons, et préserve ses ailes de la flambée. Et jusqu’à cette opposition toute classique de la bonne sœur Louise, cette raison même, une Eliante plus bourgeoise et vaillante. C’est en toute cette pièce une illusion de vie aisée, qui moutonne,