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LE THÉATRE D’HIER.

térieuse maturité, qui semble défier l’analyse dramatique, où M. Pailleron excelle.

Il s’est ingénié à ces études, et y a déposé toute son âme. Mettant à profit cette maxime que le premier amour n’est souvent que la dernière poupée, il s’est avisé d’observer jusque dans la fillette la petite femme qui y est en puissance.

Elle a mis le chapeau de sa mère et ses gants,
Une jupe de soie en manière de traîne,
El prenant là dessous des allures de reine,
Fièrement elle marche en écoutant le bruit
Délicieux, que fait l’étoffe qui la suit.


Si jeune, elle a déjà le don de se dédoubler, et de parler et de répondre pour deux, et de filer plusieurs propos à la fois. Si elle est naïve, vous le pensez : son amie a douze enfants, tous du même âge ; c’est plus commode, encore qu’assujettissant. Mais son bébé, à elle, n’est ni garçon ni fille, puisqu’il n’a pas encore d’habits. Les garçons, c’est brutal,

Puis, c’est toujours cocher quand on joue au cheval.


Voilà l’enfant. Mais que raconte-t-elle donc sur les filles ?

Les filles, ça vous a des histoires affreuses.
On les marie, et puis elles sont malheureuses.


Et sur les hommes ?

Oh ! mon mari. Madame, on le voit rarement. —
Comme le mien, Madame ; il n’a pas un moment. —
Oh ! les hommes. Madame ! — Oh ! Madame, les hommes !


Et voilà par avance la femme ; et puis, tout cela s’embrouille à merveille.

J’ai beau frapper chez lui, faire ma voix gentille :
Il me répond toujours : « Non, non, je suis pressé,