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LE THÉATRE D’HIER.

que les dieux ont décidément trop punie, sont impuissantes à le retenir sur la pente où il glisse. De l’amour il tombe dans le vice, et au terme de la glissade est la chute suprême prédite par la comtesse et ménagée par Roblot : le parjure, le mariage aux écus, l’association d’un Thommeray à une Jonquière et Cie. Par deux fois il recule ; il prend du champ pour mieux sauter. Et il en arrive, le sauvage d’hier, le Breton, le « Mohican », à recevoir une leçon d’une fille, à paraître très petit garçon devant la femme qui l’a dévoyé, et qui rachète sa faute par la souffrance qu’elle endure, à mentir à M. de Montlouis, à courber la tête devant un chacun, devant maître Roblot, qu’il traitait jadis à la cavalière, devant un courtier de vingtième ordre, un maître Jacques du plaisir, un « pied humide », lui, Thommeray, fils de Thommeray, gentilhomme ! Ruiné sur un coup de Bourse, il vend son nom à la fille d’un agioteur véreux. Mais la déchéance n’est pas complète. Après avoir oublié sa famille, il déprise sa patrie. Il renie les deux cultes qui l’ont bercé. La guerre éclate, et lui, soldat d’Afrique, fils et petit-fils de soldats, il reste à Paris, pendant que tous ses amis s’en vont faire leur devoir. Roblot lui a proposé une affaire magnifique et tout à fait française. « Il a flairé que le siège fera la fortune des marchands de comestibles… Il paraît que le beurre se vendra au poids de l’or. Il y a là un million à gagner. » Il en aurait le courage, si papa Jonquière n’avait ajouté aux conditions du mariage celle d’un départ prudent. — Pour être millionnaire, il n’en est plus à une concession près. Heureusement les Bretons défilent, biniou en tête, commandés par le comte de Thommeray ; et Jean, qui « demande à bien mourir après avoir mal vécu », rentre dans l’honneur et dans le rang. Une contagion lave l’autre.

Ce dénoûment n’a pas été sans offenser quelques délicatesses. Et je suis d’avis aussi que le théâtre se