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ALEXANDRE DUMAS PÈRE.

conclusion, avec l’esprit qui sauve tout, et je ne sais quel invincible besoin de mesurer la grandeur des idées à la fièvre des passions, non, rien de tout cela que nous connaissons bien, n’a dégénéré. Au contraire, le drame et le mélodrame paternels semblent ennoblis par le sérieux de leur objet. En ce sens et dans cette mesure, Victor Hugo rencontrait le mot juste, quand il écrivait à Dumas fils pour le consoler de la mort d’Alexandre Dumas : « Cet esprit était capable de tous les miracles, même de se léguer, même de se survivre. Votre père est en vous. »

« Ce qu’il sème, c’est l’idée française », disait aussi le poète. C’est au moins celle que concevaient les hommes nés à l’aurore de ce xixe siècle qui se levait sur des espérances magnifiques. De terribles épreuves la France sortait comme retrempée. Après s’être affranchie, elle s’enivrait d’exploits et de gloire. Il semblait que la suite des temps fût interrompue, et qu’une large déchirure se fût faite entre deux époques, dont l’une tombait dans le passé avec ses mœurs artificielles et sa civilisation amortie. Les hommes d’action étaient au pinacle ; les hommes d’imagination prolongeaient à l’infini leurs horizons. Cette énergie qu’un Stendhal cherche curieusement comme la vérité secrète des mœurs et des hommes, Dumas la met en œuvre avec une claire et mâle gaîté. Ces passions entières, que l’art d’un Mérimée esquisse d’un trait, qu’une société confiante en sa jeunesse appelle de tous ses rêves et de tous ses désirs, il les souffle partout, sur le théâtre, dans le livre, avec une puissance et une abondance de vie