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4 CHAPITRE PREMIER § 7

il ne refuserait pas non plus de prêter serment sur le Décaméron de Boccace, ne serait-ce que pour voir la mine que ferait M. Bérenger et les croyants de la religion de cet excellent monsieur.

Nous n’estimons point inutiles des sociologies qui procèdent de certains principes dogmatiques ; de même que nous ne croyons nullement inutiles les géométries de Lobatschewsky ou de Riemann ; nous demandons seulement à ces sociologies d’employer des prémisses et des raisonnements aussi clairs que possible.

Nous sommes riches de sociologies humanitaires, telles étant presque toutes celles qui se publient maintenant. Nous ne manquons pas de sociologies métaphysiques, et parmi elles il faut ranger toutes les positivistes et toutes les humanitaires. Nous avons un certain nombre de sociologies chrétiennes, catholiques ou autres. Qu’on nous permette, sans vouloir faire tort à toutes ces estimables sociologies, d’en exposer ici une exclusivement expérimentale, comme la chimie, la physique et d’autres sciences du même genre[1].

Par conséquent, dans la suite, nous entendons prendre pour seuls guides l’expérience et l’observation.

Par abréviation, nous nommerons l’expérience seule, là où elle ne s’oppose pas à l’observation. Ainsi, quand nous dirons qu’une chose nous est rendue manifeste par l’expérience, on devra sous-entendre : et par l’observation ; et quand nous parlerons de sciences expérimentales, il faudra comprendre : et d’observation ; et ainsi de suite.

7. Dans une collectivité donnée, certaines propositions descriptives, préceptives ou autres ont cours ; par exemple : « La jeunesse est imprudente. — Tu ne convoiteras pas le bien ni la femme de ton prochain. — Sache épargner, si tu ne veux pas être un jour dans la misère. — Tu aimeras ton prochain comme toi-même. » De telles propositions, unies par un lien logique ou pseudo-logique et jointes à des narrations de divers genres, constituent des théories, des théologies, des cosmogonies, des métaphysiques, etc.

Toutes ces propositions et théories sont des faits expérimentaux, tant qu’on les considère de l’extérieur, sans en chercher le mérite intrinsèque, notion qui a son origine dans la foi ; et nous devons les considérer et les étudier comme des faits expérimentaux.

  1. Pour plus de détails, voir : Guido Sensini : La teoria della Rendita. — Pierre Boven : Les applications mathématiques à l’économie politique.