Page:Paquin - Le mirage, 1930.djvu/47

Cette page n’est pas destinée à être corrigée.

LA VIE CANADIENNE

45

aisément mises dans l’immigration de 1673 ; de plus, certains registres de l’époque ayant été perdus ou détruits, il en résulte l’absence de plusieurs actes de mariages source même des statistiques. Les tableaux de M. Suite touchent néanmoins de près l’exacte vérité. La cause de madame Bourdon est entendue, comme disent les hommes de loi . Gérard MALCHELOSSE.

Journaux et Mémoires

Historiques

Si nous parlons souvent du passé c’est que notre plume et notre voix peuvent s’v exercer plus à l’aise que dans les autres modes. Trois phases se succèdent intimement au cours de notre existence : le fait accompli, le temps présent et le futur. L’avenir, justement qualifié par Victor Hugo dans son poème « 1813 » comme étant à Dieu, nous est un chapitre fermé. Boileau a dit du présent : « Le moment où je parle est déjà loin de moi ». Mais le passé, nous semble-t-il, est à nous par le prix qu’il nous a coûté pour l’acquérir. C’est afin de ne rien perdre des leçons qui s’pn dégagent et de pouvoir transmettre l’historique des faits s’y rapportant, que les annalistes, les chroniqueurs, se sont employés à tracer leurs relations, journaux, mémoires, réminiscences, etc. Un instant de réflexion doit faire comprendre que ces écrits sont d’inégale valeur, découlant de lieux, de circonstances et du tempérament particulier de l’auteur, et que, pour en tirer profit convenablement, quelle que soit leur apparence de vérédicité, il importe toujours de les comparer soigneusement avec d’autres preuvts pour établir en tout leur base vraie et juste. Il n’est personne de nous qui ne se sente attiré, pris, charmé par îes récits du passé. Notre intérêt croît en remontant l’échelle séculaire. Voyez avec quelle attention l’on a suivi le progrès des fouilles de Carter au pays des pyramides.

L’on ne peut arriver à une perception nette et claire de ces vieux mémoires et journaux, bien souvent, que muni d’une connaissance plus ou moins parfaite des moeurs, des us et coutumes de l’époque traitée. Les mots, les expressions d’alors, on changé de portée, et, référence aux anciens dictionnaires, et possible, ne donne pas toujours la solution désirable pour l’interprétation nécessaire ; il faut en plus se mettre de l’époque, en comprendre l’esprit. Pour atteindre à ce point, il faut lire les vieux recueils d’historiettes, les anciens contes, les mémoires et les autres choses de jadis.

Un jour, un Canadien inspiré de la Muse chanta sa patrie, disant qu’il ne trouvait rien d’aussi beau. Dans l’âme de ce poète, la fibre patriotique vibrait fièrement, non seulement en raison des beautés grandioses et naturelles de son pays, du majestueux fleuve, du sol fertile et des paysages incomparables qui en font la renommée, mais aussi et à cause des pages glorieuses de son passé. Il est important que nous connaissions notre histoire afin de pouvoir en parler clairement, sensément à l’occasion ; pour que l’on puisse soutenir fermement l’honneur du nom, sachant ce qu elle renferme de traits vaillants, d’héroïsme et de gloire, et, encore, afin de s’en inspirer pour envisager le présent et marcher confiants à la conquête de l’avenir. Honorer ses ascendants, connaître ce qu’ils ont fait, c’est s’identifier avec eux et comprendre leur idéal qu’il importe de continuer, reliant ainsi le passé à nos jours. Or, il n’est personne qui, lisant et méditant les annales canadiennes, ne se sente porté à l’action patriotique. À chaque page, pour ainsi dire, on y rencontre d’admirables traits de dévouement et de valeur qui soulèvent l’âme et l’ennoblissent.

Cependant, il est regrettable d’avoir à constater avec quel défaut de documentation, tt. sur quelle interprétation erronée des événements, certains auteurs se sont plu à développer telles pages, lumineuses ou secondaires, de notre histoire. Nous déplorons ce fait, car ces écrits, selon leur popularité, répandent dans le public qui aime à lire des fausses notions historiques. Il nous semble que les historiens, les romanciers et les auteurs d’historiettes, de nouvelles, etc., lorsqu’ils ont en vue une composition de cette facture pourraient s’appliquer à ne pas dénaturer les faits tout en les arrangeant selon le penchant de leur imagination. Leur oeuvre n’en serait pas moins attrayante et nous aurions en plus la satisfaction bien douce de s-avoir la vérité historique moins maltraitée. Quiconque veut étudier notre histoire avec