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mais de la vertu colorante de quelque liqueur inconnue, s’assura qu’elle provenait de cette espèce de coquillage, prit cet échantillon de laine des mains du pâtre et l’offrit comme un présent distingué à Phénix, roi de Tyr (2) : le roi frappé à son tour à la vue de cette teinte extraordinaire et admirant le hasard qui l’avait fait découvrir, ordonna qu’on lui teignît de la laine de cette couleur, s’en fit faire un manteau royal et fut ainsi le premier qui vêtit la pourpre. La nouveauté de ce magnifique costume excita l’admiration générale. Ensuite le roi Phénix défendit qu’aucun de ses sujets affectât de porter ce splendide vêtement formé des dons de la mer et de la terre, le réservant exclusivement à son usage et à celui de ses successeurs, afin que l’armée et le peuple pussent toujours reconnaître le roi à la vue de ces insignes nouveaux et dignes de respect. Jusques-là on avait ignoré l’art de teindre les vêtements ; la laine des brebis était portée telle que la nature l’avait faite ; et il n’était pas facile de distinguer les rois d’avec les gens du peuple. Au reste les rois des diverses contrées, les princes et les gouverneurs ayant une fois connu le procédé, se firent faire des manteaux, des agraphes et des tuniques de pourpre ou au moins de couleur de feu, qu’ils obtenaient du suc des plantes, et se mirent aussi à les porter habituellement, pour se faire reconnaître de leurs sujets (3), ainsi que le sage Paléphate l’a établi (4).

(1) Ce sujet a été amplement traité par Goguet, de l’Origine des lois des arts et des sciences (tom. 2, p. 90-102, édition in-8o  P. 1820) et par Camus, 2e vol. de sa traduction de l’Histoire des animaux d’Aristote, p. 698 et suivantes.