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les rendre à la liberté, à leurs amis, & de cesser d’en recruter, que de retenir, à si grands frais, une multitude aussi considérable d’hommes, dans une situation aussi stérile pour la société & pour eux-mêmes ; à en juger par la manière dont les soldats ont été traités dans la plupart des pays, on les croirait absolument sans amis. En horreur aux citoyens qui les redoutoient comme des ennemis de la liberté, trop souvent insultés par ceux même qui les commandoient, ils se trouvoient victimes d’une double oppression. Mais aussi-tôt que des principes de liberté se répandent chez un peuple, toute chose est bientôt remise à sa place ; & le soldat rend aux citoyens l’accueil qu’il en reçoit.

En réfléchissant sur les révolutions, il est facile d’appercevoir qu’on peut réduire à deux les causes qui les produisent. L’une naît de quelque grande calamité dont il faut s’affranchir, ou qu’on veut éviter ; l’autre prend sa source du desir d’un bien considérable & positif, & selon que ces causes agissent, on pourrait distinguer les révolutions en actives & passives. Dans celles qui viennent de la première cause, les esprits s’enflamment & s’aigrissent ; la réforme qu’on obtient par le danger est trop souvent souillée par la vengeance. Mais dans celles qui sont l’effet de la seconde, le cœur plutôt animé qu’agité, s’élève avec sérénité à tout ce qui provoque & nécessite un changement. La raison & la discussion, la persuasion & la conviction sont les armes des débats ; & ce n’est que lorsqu’on veut les supprimer, qu’alors on a recours à la violence. Quand les hommes s’accordent à dire qu’une chose est bonne, si on pouvoit l’obtenir, telle par exemple que l’allégement des impôts & l’extinction de la corruption, leur vœu seroit plus qu’à moitié accompli. Ce qu’ils approuvent quand à sa