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HARRISSON LE CRÉATEUR

— Pourtant l’heure est douce… et ce coin du monde est beau par l’industrie humaine… Réjouissons donc nos âmes et nos yeux !

D’un geste lent, il montrait le spectacle féerique. Toute la région était illuminée. Les habitations alignaient leurs pignons resplendissants ; dans les parcs, dans les jardins, le long des routes, des voies ferrées ou aériennes, des millions de feux se croisaient. La lumière semblait sourdre de la terre et ruisselait de toute part. Dans la vallée, la rivière roulait des diamants. Les douces haleines nocturnes balançaient mollement à la cime des arbres d’innombrables aigrettes fluorescentes. De minute en minute, le spectacle variait à l’infini. Il y avait des feux à éclipses, des scintillements, des geysers de pierreries, de soudains épanouissements de fleurs irréelles et aussi des miroitements paisibles, de lentes métamorphoses, des dévidements d’arc-en-ciel aux doigts d’une fée nonchalante. Et c’était, partout, une gamme inouïe de couleurs éphémères, un papillonnement immense, inconcevable, auquel rien de naturel ne pouvait être comparé.

Le ciel n’était ni moins somptueux ni moins étrange.

Les zones y dressaient leurs murailles de clartés. De vastes nuées artificielles erraient, s’allongeaient en flottantes chevelures violemment colorées. Enfin, des milliers d’avions voyageaient, tous feux allumés.

Les convives du banquet central et les curieux avaient en effet gagné les hauteurs de l’atmosphère. De la gare voisine, les voitures publiques s’élevaient, emportant les délégués des pays lointains. La jeunesse, les étudiants, les mondains, tous ceux d’ailleurs qui disposaient d’un appareil à moteur indé-