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UNE GENÊSE

de Flore et de l’enfant, il chargeait sans hésiter et frappait à mort. Son autorité sur les chiens s’accrut ; chef de chasse, il imposa la discipline aux plus turbulents fils de Bow et les mena contre les grands herbivores.

Lorsque l’été revint, la tribu vivait tranquille au flanc ensoleillé d’une haute montagne. La contrée était d’abord difficile mais giboyeuse, et l’on n’y relevait jamais la trace des hommes vivants. L’eau coulait en ruisselets limpides ; des grottes offraient de sûrs abris. Les arbres fruitiers de toutes espèces couvraient les pentes. Sur les terres basses, poussaient abondamment des plantes porteuses de graines sèches, presque aussi nourrissantes que la chair des herbivores. Ceux-ci, d’ailleurs, ne manquaient point dans la montagne et la vallée. Ils y vivaient par bandes nombreuses et à peu près inoffensives ; il y avait Moûh le bœuf, Ouhin le cheval, Horoho le porc, Bêê à la chaude fourrure, d’autres encore.

Flore enfanta. Elle eut deux filles, si semblables, que la mère seule pouvait les distinguer l’une de l’autre. Elle les appela Hâ et Hahâ ; le premier-né, rieur, avait déjà reçu le nom de Bihihi.

Peu de temps après la naissance des jumelles, des hommes volants passèrent sur des planeurs que portait le vent de la vallée. Les jeunes chiens, imprudents, jetèrent vers eux leur menace. Mais Flore s’était cachée avec ses enfants, et les tristes passagers ne surprirent point le secret merveilleux de la montagne.

Flore ne se joignait plus aux voyages d’exploration ou de chasse ; elle n’aventurait jamais sa famille hors des couverts. Sous la garde de quelques chiens, elle demeurait à la grotte ; elle nourrissait le feu,