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LES HOMMES FRÉNÉTIQUES

naissaient pas la fatigue, et le souffle de sa poitrine semblait inépuisable.

Dans le même temps, Flore s’était également épanouie. Haute, avec une taille flexible, elle avait des flancs évasés, des membres ronds et charnus. Sa voix était plus ample et pleine de chaudes sonorités.

Un soir d’été, après de longs jours d’abondance et de paresse, comme ils jouaient avant le sommeil, Samuel, animé tout à coup d’une fureur inconnue, la poitrine grondante, maintint sous lui sa compagne. Et Flore, la gorge soulevée, les yeux pleins d’un ravissement angoissé, jeta sous les premières étoiles un long cri tremblant.

Ils devinrent plus indolents, moins avides de jeux, de courses et de luttes. Leur amitié pour les chiens se refroidit momentanément. Ils ne traitaient plus leurs alliés sur le pied d’égalité. Les chiens les nourrissaient ; eux acceptaient les offrandes mais demeuraient économes de caresses et refusaient de gambader avec les jeunes fils de Bow.

Flore avait des gestes harmonieux et lents. Couronnée de fleurs, elle se penchait sur l’eau des sources. Souvent, elle se cachait sous les arbres et Samuel, tout de suite anxieux, jetait son cri d’appel. Alors elle se laissait voir ; balançant son torse poli, elle avançait à petits pas, elle glissait, les hanches houleuses, les bras arrondis au-dessus de sa tête. Samuel bondissait vers elle et la terrassait.

À la fin de l’été, ils eurent une alerte : des hommes voyageurs furent aperçus dans le pays. Il fallut fuir, vite et longtemps. L’ardeur de leur sang s’apaisa. Flore, peu à peu, devint lourde ; puis ses flancs palpitèrent, et elle refusa tout à fait les jeux d’amour.