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LES HOMMES FRÉNÉTIQUES

tion du soleil de midi. Mais des montagnes très élevées se dressèrent sur leur route ; la terre fut plus aride, les fruits beaucoup plus rares. Les deux enfants durent attaquer de petits animaux. Ils souffrirent et leurs forces, au lieu de croître, déclinèrent. Pendant plusieurs jours, ils furent perdus au milieu d’un immense champ de neige. Le soleil ne paraissait plus ; leurs mains engourdies et maladroites ne parvenaient pas à tirer le feu des branches glacées. Ils grelottaient malgré leurs fourrures et ils avaient faim. Par bonheur, ils rencontrèrent une petite grotte au fond de laquelle ils dormirent longtemps, étroitement enlacés.

Lorsqu’ils quittèrent la grotte, amaigris et languissants, des bouffées de douceur leur caressèrent le visage : l’hiver lâchait prise. Ils s’engagèrent dans une vallée où les rongeurs pullulaient ; sans trop de peine, ils en capturèrent beaucoup et mangèrent avec avidité. Puis ils reprirent leur marche vers les terres chaudes.

Ils cheminèrent parmi de doux paysages, et la saison généreuse ramena la joie. Leurs membres avaient retrouvé la souplesse et une force accrue ; leur sang courait allègrement.

Ils rencontrèrent encore des montagnes, passèrent des fleuves, suivirent pendant quelque temps les beaux rivages de la mer.

L’hiver revint, mais non la cruelle neige ; la bonté du soleil demeurait épandue sur la terre.

Ils vivaient paresseusement. Ce n’était pas le goût des aventures qui les faisait voyager, ni l’attirance des horizons inconnus. Mais ils obéissaient aux volontés obscures de la terre et du ciel ; ils obéissaient au soleil, aux nuées, aux vents, aux saisons. Surtout, ils fuyaient les hommes. À plusieurs