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LES HOMMES FRÉNÉTIQUES

naires, par son lourd cerveau inquiet où le rêve de la vie s’agençait en systèmes indéfiniment perfectibles.


On glissa, par degrés insensibles, de l’agitation politique violente à l’état de guerre véritable.

Au début, chaque parti prétendait agir seulement par des moyens de pression énergiques, contraires peut-être au droit des gens, mais excluant néanmoins le recours aux armes offensives. Ce fut le temps des grandes grèves : grèves des maraîchers, des producteurs agricoles, des éleveurs, grève des distributeurs ; ripostes immédiates des transports généraux, de la météorologie, du cinétéléphone, des centrales industrielles. Les méridiens menaçaient d’affamer la société, les parallèles de l’énerver. Des incidents tragiques ne pouvaient manquer de se produire. En plusieurs régions, les producteurs furent expropriés par la force ; ailleurs, ils résistèrent victorieusement. On pendit les distributeurs et l’on mit à sac des réserves clandestines. Les agents des centrales traquaient les artisans à domicile, gens de méridiens, et détruisaient leurs installations.

Peu à peu, tous les groupements qui essayaient de garder la neutralité se virent, quelle que fût leur répugnance, amenés à prendre parti. Au bout de trois semaines, la mêlée était générale ; la société allait à l’abîme.

Et cependant, il se trouvait encore des gens pour soutenir qu’il s’agissait d’un trouble de croissance un peu grave, d’une épreuve d’où l’humanité sorti-